Historia brevis rerum generalium

[Gaens & De Grauwe 2006]96-97 : O. L. V. Genadedal te Sint-Kruis bij Brugge 1318-1783 (Domus Vallis Gratiae)1
Gesticht in 1318 door Jan van Koekelare en andere valentes, honorabiles et potentes personae, vermoedelijk uit de kring van graaf Robrecht van Bethune. De eerste monniken waren professen van Saint-Omer en Valenciennes.
De kartuizers konden vrij vlug bezittingen en inkomsten uitbreiden, onder meer door giften van de familie Vander Buerse, Egidius van Aartrijke en Adam van Westkapelle. In 1398 bracht Filips de Stoute alle bezittingen van Genadedal in de dode hand (zgn. amortisatie).
Tijdens het schisma wilden de meeste Brugse monniken, net als de kartuizerinnen, voor de urbanistische paus kiezen. In 1394 werden echter op bevel van hertog Filips de Stoute, bondgenoot van de clementisten, 12 monniken van de Brugse kartuis per schip naar het Kiel overgebracht om daar onder het gezag te worden gesteld van de Kielse prior Willem van Wadenoyen. Na korte tijd werden ze naar de Franse kartuis van Gosnay gezonden. In het begin van 1395 werd Herman Clincke, een Kielse monnik, tot prior te Brugge aangesteld. Onder het bestuur van Clincke werd er tot aan de opheffing van het schisma gekozen voor het clementistische kamp.
Het klooster kende een stijgende welvaart in de vijftiende eeuw, maar telde nooit meer dan het normale aantal van een twaalftal monniken. De goede financiële situatie verslechterde aan het begin van de zestiende eeuw, toen Karel V hoge belastingen eiste om zijn oorlogen te bekostigen.
De godsdienstoorlogen in de zestiende eeuw verplichtten de kartuizers kun klooster te verlaten en zich in een huis binnen Brugge te vestigen. Op 5 april 1578 werd het klooster te Sint-Kruis verwoest. Tussen 1580 en 1584 werden de monniken verspreid en was er zelfs geen prior.
In 1609 konden de kartuizers het oude begijnenklooster van Sint-Aubertus kopen, en in 1625-26 werd gestart met een grote verbouwingsoperatie. De nieuwe kartuis, op de plaats van het huidige justitiepaleis, zou de kartuizers huisvesten tot aan de opheffing in 1783.

[De Grauwe 1978a]1197-1198 : Chartreuse du Val-de-Grâce à Bruges
La chartreuse du Val-de-Grâce fut fondée en 1318 dans la paroisse de Sainte-Croix-lez-Bruges par un groupe de nobles et d’aristocrates; parmi eux, seul Jan van Koekelare est connu. Il est le donateur d’un terrain en vue de la construction du monastère.2 Robert de Béthune, comte de Flandre, posa la première pierre en 1318 et amortit les biens des chartreux3 en avril 1319. Les prieurs de Valenciennes et de Saint-Omer furent les initiatores de la nouvelle chartreuse. Le premier prieur fut Jean van Maldegem, profès de Saint-Omer. Immédiatement, les bienfaiteurs affluèrent et le monastère connut un début prospère. Il se développa régulièrement et jouit d’une certaine aisance au XVe siècle. Mais, dès le milieu du XVIe siècle, on constate une nette régression et, vers 1560, la chartreuse fut près de la ruine. Une décision de la Ville de Bruges 9 avril 1578 mit fin à l’existence du monastère hors de la ville. Les moines durent se retirer à l’intérieur des remparts, où la vie cartusiemie reprit bientôt. Lentement le monastère se remit de ses dommages et la reconstruction recommença. Tout au long des XVIIe et XVIIIe siècles, la vie cartusienne s’y développa sans grands événements. Le 17 mars 1783, l’édit de Joseph II mit fin à la chartreuse du Val-de-Grâce.
Au point de vue social, l’influence du monastère n’a pas été très grande. Le mode de vie cartusien ne permet d’ailleurs pas beaucoup d’action sociale, sauf par des aumônes. Vers la du XVIIe siècle et au XVIIIe siècle, on vit quelques retraitants se retirer pour un bref séjour dans la chartreuse. Dans le cadre général de l’organisation de l’Ordre cartusien, la chartreuse de Bruges appartint, lors de sa fondation, à la province de Bourgogne. En 1332, une division des provinces eut lieu à l’intérieur de l’Ordre; elle rattacha la maison de Bruges jusqu’en 1380 à la province de Picardie. De 1380 à 1410, le grand Schisme d’Occident causa une scission dans l’Ordre des chartreux. La maison de Bruges prit le parti du pape Urbain et dépendit donc de la chartreuse de Seitz, maison centrale des monastères urbanistes. En 1411, toutes les chartreuses se regroupèrent sous l’autorité de la Grande Chartreuse et on procéda à la création de nouvelles provinces. La maison de Bruges dépendit définitivement de la province de Picardie éloignée: provincia Picardae remotioris, qui prit en 1474 le nom de province teutonique: provincia Teutoniae, jusqu’à la suppression en 1783.

[De Grauwe 1985a]40-46 : Bruges
Quatre ans après la fondation d'Hérinnes en 1314, eut lieu celle de Bruges. Il est bien difficile de dire pourquoi cette ville fut choisie, car elle se trouve en ligne droite à quelque 75 km d'Hérinnes, ce qui est tout de même une belle distance. Mais nous savons par contre que la famille des fondateurs d'Hérinnes fut liée à celle des fondateurs de Bruges. Philippe IV, seigneur de Maldegem et un homme important à Bruges avait épousé en 1309 Marie d'Enghien. Philippe avait un frère chartreux â Saint-Omer et sa femme Marie d'Enghien était la fille de Gérard van Zottegem, exécuteur testamentaire de Gauthier II, fondateur d'Hérinnes. Les noms des fondateurs sont inconnus, sauf un. Ils sont appelés dans les actes multe valentes, honorabiles et potentes persone et appartiennent donc, comme Philippe IV, à la haute aristocratie brugeoise. Le seul nom cité est celui de Jean van Koekelare qui fit don de la parcelle, appelée Coolstick, aux initiateurs afin d'y construire un nouveau monastère. Il était d'abord clerc, puis presbiter à la paroisse de Notre-Dame à Bruges où il habite. Son père était Gauthier van Koekelare, chevalier; sa mère Marie Visch fut considérée par l'Ordre cartusien comme bienfaitrice de la nouvelle fondation, lors de son décès en 1319 ou 1320. Jean van Koekelare gratifia la chartreuse encore d'autres biens. Il fut enterré en 1334 dans le monastère.
Les autres fondateurs de la maison de Bruges sont très probablement aussi des Brugeois. En effet dans la lettre d'amortissement de Robert de Béthune du 12 avril 1319 on peut lire que les terres furent relevées en mainmorte "à la demande répétée de quelques Brugeois”. Et le prieur-général écrivit à l'administration de la ville de Bruges une lettre dans laquelle il promit de faire participer cette administration aux prières des chartreux "en raison des grâces spéciales que celle-ci offrit lors de la fondation du monastère”. Le prieur-général Aymon avertit les initiateurs, Robert, prieur de Valenciennes, et Guy, prieur de Saint-Omer, de la demande des Brugeois. Ceci eut lieu en octobre 1318. Ils se rendirent, accompagnés de Jean, procureur de Saint-Omer, à Bruges pour y voir sur place les dispositions à prendre en vue de l‘érection de la nouvelle maison. En présence du prieur de Mont-Dieu, Jean van Koekelare fit officiellement don devant notaire du terrain appelé Coolstick. Les initiateurs décidèrent de donner le nom de Val-de-Grâce à la nouvelle fondation et de désigner comme prieur, Jean van Maldegem, profès de Saint-Omer. La chartreuse se mit immédiatement d'accord avec le chapitre de Saint-Donatien, dont elle dépendit juridiquement. Le 12 avril Robert de Béthune amortit les biens du nouveau monastère. Le début fut donc très prometteur.
Les premiers moines furent le prieur Jean van Maldegem, Jean Adam et Lambert Clericus, profès de Saint-Omer. Les deux derniers exercèrent respectivement la fonction de vicaire et de procureur. Ils acquirent des biens suffisants afin de permettre de recruter des moines. André van Hove donna trois bonniers de terre en 1319. Michel Celiau gratifia son futur monastère en 1319 de vingt mesures de terre sises â Zande. Plus tard il donna encore bien des choses. D'autres bienfaiteurs furent la famiiie Vander Buerse, Gilles van Aartrijke, Guillaume Reepere, Adam van Naaskapelle etc. Trés vite entrèrent les premiers novices e.a. Jean de Backere qui avait été procureur de l'abbaye bénédictine de Saint-André et Daniel vander Elst, prévôt de Saint-Martin à Ypres.
Pendant cette première période, jusqu'à environ 1400, le monastère se déveioppa réguiièrement sans pour autant devenir riche. Il y eut des dons, des achats, des échanges, des rentes qui permirent de vivre convenablement et de recruter des religieux. Déjà en 1330 fut conclue une association de prières entre les chartreux de Bruges et ceux de Gosnay, suivie en 1340 par une autre avec les moniales de Gosnay et une avec les moines de Saint-Omer.
En 1375 Bruges coopéra â la fondation de la nouvelle maison de Chercq-lez-Tournai. Mais vers la fin du siècle eurent lieu plusieurs événements troubiant sérieusement la vie de la communauté: Les grandes inondations qui détruisirent dix-sept villages du Nord des Fiandres. Comme plusieurs biens de la chartreuse de Bruges étaient situés dans cette région, elles eurent une influence néfaste sur l'économie du Val-de-Grâce. La grande révolution gantoise (1379-1385) causa aussi des dégâts aux biens des chartreux. Le troisième événement, le plus grave: le grand Schisme d'Occident avec ses répercussions sur l'Ordre cartusien divisé en deux dès 1380. La maison de Bruges soutint au début le pape Urbain à Rome, mais bien vite elle se mit du côté du pape Clément d'Avignon, probabiement sous l'influence du duc de Bourgogne. En reconnaissance ce dernier, Philippe le Hardi, amortit beaucoup de biens de la chartreuse de Bruges en 1398. Les dissensions à l'intérieur restèrent pourtant grandes car non seulement deux prieurs furent déplacés, mais en 1394 douze moines du Val-de-Grâce furent conduits à la maison du Kiel-lez-Anvers sur ordre du duc parcequ'ils ne vouiaient pas reconnaître le pape d'Avignon.
Citons parmi les moines les plus importants de cette première période Guillaume Busere, prieur de 1340 à 1350, qui fut également visiteur de la province. Lors de la fondation du monastère des moniaies de Sainte-Anne iui aussi fut présent à la passation de l'acte par lequel les fondateurs offrirent une terre aux moniaies. Sous son gouvernement commença très probablement la construction de l'église définitive. Paul Arnaud fut deux fois prieur: de 1350 à 1352 et de 1354 jusqu'à sa mort en 1370 ou 1371. En 1369 il exerça les fonctions de visiteur. Ce premier priorat de iongue durée permit une gestion plus continue. Tydeman Graeuwert fut prieur de Bruges de 1390 à 1391. Il le fut aussi à Liège.4
La deuxième période qui commence au début du quinzième siècle montre une diminution de dons et plusieurs procès à propos de la perception des loyers. Elle se termine vers 1580. Une chose étonnante est le fait que sur les neuf prieurs qui gouvernèrent la maison entre 1396 et 1459 il y eut six Hollandais, deux profës de Monnikhuizen à Arnhem et quatre d'Utrecht. Une grande catastrophe se produisit le 19 novembre 1404: une inondation immense recouvrit la région d'Ysendijke. Plusieurs terres appartenant aux chartreux furent définitivement perdues. Vers la même époque ils en perdirent d'autres en raison de la décision des magistrats brugeois de creuser de nouveaux fossés de défense autour de la ville.
En 1421 la maison de Geertruidenberg fut ravagée par des inondations et plusieurs moines de cette chartreuse trouvèrent un abri pour queiques années à Bruges. Vers 1435 il y vivait douze moines, deux clercs-rendus et deux convers. La famille Ruebs, à laquelle appartint Jacques Ruebs, prieur de Gand de 1420 à 1460, fut parmi les grands bienfaiteurs entre 1440 et 1450. Thomas van Mijnen, prieur de 1450 à 1459, fut énergiquement réprimandé par le Chapitre Général de 1457: il ne pouvait plus permettre aux moines fugitifs de passer la nuit chez lui, sauf si cela se fit selon la forme voulue par les Statuts. On ignore ce qui s‘était passé exactement pour être réprimandé de la sorte. Une autre réprimande fut envoyée par le Chapitre General de 1475: ils ne pouvaient plus accepter de séculiers au choeur et ils ne leur était pas permis de cultiver des plantes aromatiques derrière les cellules des moines.5 Malgré ce manquement aux Statuts, la maison de Bruges eut une bonne renommée puisque Denis le Chartreux qui devait commencer la nouvelle fondation à Ruremonde vint rendre visite à Bruges en 1466 très probablement en vue d'y trouver des initiateurs. La fin du quinzième siècle connut les bienfaiteurs suivants: Guy de Baenst, Josse de Baenst et Elisabeth Adornes. MaÏgré leurs dons, le Val-de-Grâce connut encore des difficultés financières. Ainsi Charles le Téméraire exigea-t-il que la chartreuse payât avant le premier février 1475 480 livres parisis et 300 livres de gros comme taxe sur tous les biens acquis depuis soixante ans sans amortissement.
Le début du seizième siècïe est connu par les guerres de Charles Quint, lesquelles entraînaient beaucoup de frais. La chartreuse de Bruges pouvait pourtant de la part de l'empereur posséder en 1515 des biens jusqu'à un montant de dix livres de gros. Un peu après il amortit en faveur des chartreux tous les biens achetés depuis quarante ans moyennant payement de 1800 livres parisis. En 1523 les religieux durent payer une somme de deux cents livres â Charles Quint, quote part aux frais causés par ses guerres. Et pourtant, entre 1535 et 1538, on fit plusieurs réparations aux bâtiments existants et on en construisit même encore d'autres tel une brasserie.
Peu de temps aprés, la situation financière devint de nouveau plus mauvaise: les chartreux anglais chassés d'Angleterre vinrent chercher refuge â Bruges, ce qui provoqua évidemment de gros frais. Dans la semaine précédant la Toussaint 1552 un incendie éclata dans la brasserie du monastère, entraînant de nouvelles dépenses. Et Charles Quint, qui avait taxé la chartreuse en 1546 pour une somme de trente-deux livres, la taxa encore en 1552 mais pour une somme beaucoup plus élevée: cent quarante livres de gros. En raison de toutes ces dépenses la chartreuse dut emprunter en 1553 de l'argent. Par dessus le marché quelques bâtiments du monastère furent taxés en 1555. Il n'est pas étonnant que les comptes de ia chartreuse accusent pendant plusieurs années un déficit.
Les chartreux anglais, rentrés chez eux en 1555, revinrent demander l'hospitalité au Vai-de-Grâce en 1559, chassés définitivement de leur pays. Ils furent douze. Cela entraîna des dépenses extraordinaires. Mais à l'intérieur de la maison l'arrivée des moines anglais causa d‘autres difficuités. On essaya d'y rémédier en mettant les chartreux anglais sous la direction spirituelle de Maurice Chauncy6, car c'était surtout des difficuités linguistiques. On n‘obtint pourtant pas de résuitats satisfaisants. On dut trouver une autre solution. On la crut trouvée en nommant Chauncy prieur des moines flamands et anglais en 1561, mais ce n'était pas encore la solution idéale. Finalement on décida de créer une chartreuse autonome pour les Angiais en 1568.
La fin de cette seconde époque fut marquée par des ennuis aussi bien intérieurs qu‘extérieurs. En 1573 les moines avaient pensé quitter le Val-de-Grâce. Pendant quelque temps ils résidèrent à l'intérieur de la ville de Bruges et un administrateur des biens ecclésiastiques avait la charge des possessions du monastère. Mais 1578 fut l'année fatale: en exécution d'une décision des magistrats de Bruges du 9 avril 1578 les bâtiments furent rasés. Les moines avaient pu quitter leur monastère et s'étaient de nouveau réfugiés en ville où ils ne se sentirent pourtant pas en sûreté non plus. De la fin de 1580 jusqu'au mois de mai 1584, les moines furent dispersés et ils n'eurent même plus de prieur.
Les Chapitres Généraux de 1575, 1577 et 1578 envoyèrent des admonestations au prieur Jean van Ieper (1571 ou 1572-1580): qu'il veille à installer un parloir pour les femmes afin qu'elles puissent y manger et qu'elles ne soient plus obligées de le faire dans une chapelle; qu'il soit un exemple pour les siens à tout point de vue et qu'il évite des familiarités avec les gens du monde. Ces réprimandes ne furent pas données sans raison car à la fin de 1580 Jean van Ieper apostasia. Il s'enfuit à Gand où il vivait maritalement avec une ex-religieuse du Nieuwenbosch. Ce fut la fin de cette deuxième période bien nouvementée.
Parmi les moines les plus importants citons Otto Amilii van Moerdrecht, né à Montfoort. Il fit des études universitaires à Paris en 1403. On le trouve chanoine à Utrecht et à Aix-ia-Chapeiie en 1412. Il se fit chartreux à Utrecht en 1423. ll y fut prieur de 1428 a 1433. À ce moment ll se rendit au Val-de-Grâce comme prieur. Il mourut, prieur, le 7 mars 1438. Jean Vos, né â Deift, fut chevaiier de l'Ordre Teutonique. Il entra en chartreuse à Utrecht vers 1430. Après y avoir été procureur, il fut envoyé par le Chapitre Général de 1441 à Bruges comme prieur. En 1450 il changea de maison: il devint prieur de sa maison de profession jusqu'en 1458. Il y mourut le 15 février 1462. Martin Adornes, né le 15 julllet 1450, fut le petlt-flls de Pierre Adornes, mort en 1465 comme clerc-rendu du Vai-de-Grâce. Il appartint â la grande famille des Adornes, marchands très connus à Bruges. Son père est Anseime Adornes, bienfaiteur du monastère. Martin fit profession à Bruges et commença son priorat en 1491. Celui-ci dura jusqu'à son décès le 10 décembre 1507. En 1496 il fut nommé convîsiteur et en 1497 visiteur.
La troisième période commence en 1584 et dura deux siècies jusqu'en 1783, l'année de la suppression. Elle fut marquée par des hauts et des bas à tous points de vue. Lorsque les chartreux quittèrent définitivement leur monastère â Sainte-Croix, ils résidaient d'abord dans leur refuge, rue de Jéruzaiem, et dans une grande maison qui leur avait été offerte par la famille Adornes. Mais ces deux maisons ne furent pas suffisantes. Ils eurent alors la chance de pouvoir acquérir en 1609, grâce à l'intervention des archiducs Albert et Isabelle, le béguinage de Saint-Aubert.
Comme nous avons déjà dit, les moines furent dispersés entre 1580 et 1584. La première action du prieur, Hercule van Winckel, fut de rassembier les reiigieux dans ieurs maisons de Bruges, qu'il aménagea dans la mesure du possibie selon les prescriptions des Statuts. La vie conventuelle reprit; on acheta de nouveaux bréviaires et des livres de spirituaiité pour la bibilothéque. La maison eut une assez bonne renommée puisque quand les visiteurs de Picardie vinrent faire la visite spéciale en novembre 1609 on ne dut pas déposer le prieur. Le vicaire et le procureur déménagèrent. Dix ans plus tôt, les novices furent envoyés à Louvain pour y faire leur noviciat. Beaucoup de frais furent occasionnés par de nombreux voyages en vue de régler plusieurs différends e.a. à propos d'argent prêté. En 1625-1626 les chartreux achetèrent quelques maisons aux environs immédiats du béguinage Saint-Aubert et ils réparèrent l'égilse. Pour en faire une véritable chartreuse le prieur, Jean Pipenpoy (1635-1653), reconstruisit sans tarder les bâtiments achetés. La première pierre fut posée le 27 juillet 1635. Tout était certainement terminé en 1648.
En 1670 on fit construire deux murs pour protéger la chartreuse contre les voisins et queiques années plus tard on fit peindre l'église. Les temps peu sûrs obligèrent les chartreux de se munir de lettres de sauvegarde de la part des Français. Au même moment le prieur obtint d'être exemptê du logement des troupes. Une certaine négligence dans l'observation des Statuts se fit remarquer le 6 octobre 1679 quand le prieur Nicolas Brouckman (1677-1683), fit venir maître Fonteyne, chantre de l'église de Saint-Sauveur pour l'exêcution des chants. Fut-ce la cause de la visite extraordinaire de 1680?
Et malgré tout la maison de Bruges garda sa bonne renommée car les chartreux anglais y envoyèrent en 1685 et 1686 leurs novices. Il faut dire pourtant que la maison de Bruges fut la plus proche de celle de Nieuport, chartreuse des moines anglais. À partir de la fin du dix-septième siècle on reçut parfois des laïcs ou des prêtres au monastère pour y faire une retraite. Ceci ne fut pas entièrement conforme aux décisions des Chapitres Généraux. À ce moment on fit aussi appel aux services de domestiques. Ainsi le portier et le cuisinier furent-ils des laïcs, preuve d’une diminution du nombre des convers ou donnés. En juin 1719 eut lieu une visite extraordinaire faite par les visiteurs de Picardie. La raison en reste inconnue.
Ainsi continua la vie de la chartreuse du Vai-de-Grâce. Les finances ne furent pas splendides: une note dans les comptes de 1750 indique que les chartreux perdirent une somme importante d'argent à l'occasion des nouveaux taux de change instaurés par un édit de l'impératrice Marie-Thérèse. De 1757 à 1767 les religieux de Bruges eurent comme prieur un Français, Hyacinthe Landry, profès de Nancy. Il ne connaissait très probabiement pas le néeriandais, car les comptes sont écrits par lui en latin ce qui ne fut plus le cas depuis la fin du quinzième siècle. On ignore pourquoi le Chapitre Général prit la décision d'envoyer un étranger au Vai-de-Grâce. Probabiement parce que dom Hyacinthe était un bon bâtisseur. Vers les années 1770 on exécuta des travaux d'embellissement à plusieurs bâtiments; d'autres furent réparés; on édifia la nouvelle église entre 1771 et 1774. Pour les cours de thélogie donnés aux jeunes pères on fit appei â un père carme. Ceci prouve encore la diminution du nombre des religieux. La fin de la chartreuse fut proche. Le décret de Joseph II du 17 mars 1783 fut lu le 5 avril devant les religieux du Vai-de-Grâce et dut être exécuté le 28 suivant. Après le depart des moines qui durent faire officiellement le choix de leur vie future, on procéda à la vente des biens. Jusqu‘en 1789 le Comité de la Caisse de Religion géra et vendit les biens meubles et immeubies de la chartreuse de Bruges. Ce fut la fin définitive car on n'essaya pas de recommencer la vie conventuelle comme ce fut le cas dans plusieurs autres monastères.
Il nous reste à citer encore quelques noms de moines importants de cette époque. Hercule van Winckele, né à Bruxelles, fit profession à Scheut le 8 avri1 1567. De 1575 à 1584 il fut prieur du Bois-Saint-Martin et de 1584 à 1597 à Bruges. Il le fut encore dans sa maison de profession (1597-1599), à Louvain (1599-1608) et une deuxième fois à Bruxelles (1608-1609). Démis de ses fonctions par les visiteurs extraordinaires de novembre 1609, il mourut à Zelem le 5 juillet 1611. Il fut convisiteur de 1597 à 1601 et visiteur de 1601 à 1609. Gisbert Bauhuys (alias van Bauwhuysen) naquit vers 1570 à Anvers où son père fut un commerçant renommé. Il fit sa profession monastique à Louvain en 1598. Après avoir été recteur et prieur de Bruxelles (1605-1608), il le fut à Bruges (1608-13.4.1614) et de nouveau à Bruxelles (1614-1621). De 1621 à 1627 il exerça les fonctions de vicaire chez les moniales de Sainte-Anne et de 1627 à 1631 celles de prieur â Louvain. Il y devint alors vicaire et le resta jusqu'à sa mort survenue le 22 septembre 1635. Il fut convisiteur de 1611 à 1613. Jean Pipenpoy, né à Molenbeek-lez-Bruxelles, magister artium et baccalaureus theologiae de l'Universitë de Louvain, fit sa profession monastique à Bruxelles le 23 avril 1623. Il résida pendant trois ans à Gosnay. En 1627 il exerça les fonctions de procureur de sa maison de profession. Il fut recteur et prieur de Bruges de 1635 à 1653 et prieur de Bruxelles de 1653 à 1679. Il y mourut coadjuteur le 9 mai 1681. Deux priorats d'une si longue durée furent exceptionnels au dix-septiéme siëcle. Wencesclas de Plenevaulx est entré vers 1566 dans la chartreuse de De1ft. Lors de la destruction de cette maison en 1572, il trouve un refuge à Arnhem et puis à Cologne. De retour en 1576 aux Pays-Bas il se rend à Hêrinnes. À des dates imprécises il exerce la fonction de prieur à Bonlieu et Seillon. Il retourne ensuite en Flandre et est vicaire à Bruges (1596 ?-1601) et à Gand (1601-1604), coadjuteur à Bruxelles (1604-1608), procureur (1606-1608) et vicaire (1608-1609) au Bois-Saint-Martin. Il est mort le 10 janvier 1621 comme hôte à Zelem où il résidait certainement déjà en 1618. Il est l'auteur d'un petit livre contenant des répons et antiennes à chanter hors du choeur en faveur de dom François de Caveneer, profës de Bruxelles, décédé en 1611. Il a écrit aussi une longue lettre sur le martyre des chartreux hollandais en 1618 à dom Gisbert Bauhuys, prieur de Bruxelles.

  • 1. De toewjzing van het klooster aan de bescherming van Onze-Lieve-Vrouw is geen bestanddeel van de kloosternaam.
  • 2. A. Êv. Bruges, C, n° 372, 5 décembre 1318.
  • 3. A. É. Bruges, Fonds des chartreux, n° bleu 7.461 : 12 avril 1319.
  • 4. Voir cette notice.
  • 5. Il s'agit probablement des jardins des cellules qui n'eurent peut-être pas encore la même forme qu‘actuellement.
  • 6. Voir sur lui la notice de Sheen Anglorum.